
Qui a-t-il de commun entre, le paradoxe de Fermi, des figures mathématiques et des poupées russes, un saxo et un piano, des éléments de jazz fusion, des moments du death metal prog ? Pas grand-chose à première vue. Et pourtant tous ces éléments choisis avec soin et travaillés minutieusement donne l’univers musical de Fractal Universe.
Bonjour Fractal Universe, vous avez sorti 5ème album, pouvez-vous vous présenter et me raconter l’histoire du groupe en quelques mots s’il vous plait ? Vous avez eu un changement de line-up Yohan est votre nouveau guitariste depuis peu ?
Vince Wilquin : je suis le chanteur, guitariste et saxophoniste du groupe. En effet, Hugo notre ami et guitariste de longue date a décidé de quitter le projet et a été remplacé par Yoajj Dully qui fait un super boulot depuis son arrivée.
Valentin Pelletier : je suis le bassiste
En quoi le concept mathématique des Fractales définit et influence votre musique ? Et pouvez-vous me dire comment vous intégrez ce concept à votre univers musical ?
Vince : une fractale est une forme mathématique sur laquelle on peut zoomer à l’infini et trouver à chaque fois de nouveaux détails. On retrouve ce concept dans notre musique, parce qu’au fil des écoutes successives, l’auditeur va faire de nouvelles découvertes. Notre musique a cette structure fractale.
C’est une musique exigeante. Il faut vraiment avoir une attention pour la découvrir et la redécouvrir à chaque fois ?
Vince : oui, même si j’espère qu’on peut l’écouter et en retenir quelque chose dès la première écoute. En ce qui me concerne, j’’aime écouter vraiment la musique c’est à dire à me concentrer et à me réjouir de trouver des petites choses que je n’avais pas remarqué la fois précédente. Je pense que cela régit notre manière de composer. On cherche à éveiller la curiosité et à proposer une musique que les gens n’ont pas entendu ailleurs.
Valentin : Il faut que ce soit une écoute active et pas un truc que tu mets en fond. Sinon, c’est un peu dommage.
Sinon, on passe à côté de l’essence même de votre travail.
Vincent : oui, et je trouve regrettable que la musique soit de plus en plus vendue comme un produit, comme un objet omniprésent auquel on ne prête plus attention. C’est important de garder de la valeur à la musique en prenant du temps pour l’écouter et passer un moment agréable.
On parle de d’univers atypique et conceptuel, de death metal progressif, comment définiriez-vous votre musique et comment « démystifieriez » vous tous ces « grands » mots ?
Vince : Je dirai que nous sommes un groupe résolument metal mais qui essaye d’en casser les codes. Il y a des couleurs et une palette sonore assez large qu’on ne trouve pas forcément ailleurs. Il y a du saxo et des passages extrêmement intenses et d’autres plus aériens.
Valentin : comme je le dis à ma grand-mère, c’est de la musique puissante mais avec de grands passages atmosphériques et une mélodie très distincte.
On vous demande souvent quelles sont vos influences « metal » plus rarement celles provenant du jazz. Quelles sont-elles et comment les intégrer vous à vos compos ?
Vince : Il y en a de nombreuses. Je suis un grand fan du pianiste Tigran Amasyan. Il a fait l’inverse de nous en prenant pas mal de chose dans le metal pour les amener dans le jazz et ça fonctionne à merveille. J’aime aussi beaucoup les frères Brecker. Michael est celui qui m’a motivé pour commencer le saxo. Leurs albums qui sont vraiment bluffant vont plus sur la fusion et le funk. Il y a également Alan Oldsworth qui comme pour de nombreux guitaristes metal m’a beaucoup influencé. Mais mon côté bassiste fait que j’ai écouté et vu plusieurs fois en concert Avishai Cohen
Comment intégrez-vous les textes de Arthur Massot et comment vous vous appropriez ses paroles ? Est-ce un travail collaboratif ?
Vince : On a travaillé effectivement avec lui pour l’EP et les 3 premiers albums. On lui envoyait la musique, on discutait ensemble du concept. A lui ensuite de se charger d’une grande partie de l’écriture. Le but étant d’essayer de faire coïncider la musique et les paroles.
Pour cet album, c’est moi qui me suis chargé des textes en intégralité pour la première fois. Le processus a un peu changé même si la musique est toujours composée en premier et est dictée par les couleurs et les thèmes que l’on va y mettre.
Etait ce une envie que tu avais depuis longtemps ?
Vince : Oui, une envie, plus d’inspirations. J’ai voulu essayer et ça a fonctionné.
Et comment vous vous répartissez les rôles ? C’est la musique d’abord, les paroles ensuite ?
Vince : On écrit nos albums d’abord de manière instrumentale, en ayant en tête les lignes de chant et les paroles. Ce sont eux qui viennent au service de la musique. Du coup les textes cherchent à reproduite ce que les notes évoquent.
Valentin : on retravaille en répétition les morceaux que Vince a déjà composé en grande majorité. On voit ce qui marche ou pas, on réadapte des parties ou la structure de certains titres.
Il y a une grande partie quand même collaborative.
Vince : Je pense aussi que c’est bien d’avoir un regard extérieur sur mon travail pour affiner le tout.
Pourquoi ce titre de The Great Filters pourquoi traiter de ce paradoxe de Fermi ?
Vince : l’idée de savoir pourquoi nous ne sommes pas capables de détecter une forme de vie extraterrestre sur les milliards de planètes qui existent probablement. Il y a tout un tas de réponses à cette question et beaucoup font écho à notre situation terrestre. On pourrait par ex se dire que chacune de ces civilisations a tendance à surexploiter ses ressources et causer sa propre disparition. Et c’est ce qui risque de se produire chez nous.
On va parler de quelques morceaux. Le premier qui est Causality Grip. Est-ce que vous pouvez m’expliquer le concept ?
Vince : Ça parle d’une facette du paradoxe de Fermi et qui va le résoudre de façon assez simple en disant que l’univers est trop grand, et que les lois de la physique font qu’on ne pourra jamais se déplacer plus vite que la lumière et qu’en conséquence on restera cloisonné à notre réalité. Donc pour moi, l’idée est de se dire qu’on a une seule planète et qu’il faut en prendre soin. Parce qu’il n’y a pas de plan B
On va parler aussi de Seeds of Singularity. Dans ce morceau vous abordez l’arrivée de l’IA dans l’art et les conséquences que cela peut avoir sur la création artistique.
Vince : dans le clip une personne peint un tableau en étant reliée à une machine qui lui dicte ses gestes. C’est quelque part ce qui est en train de se produire avec l’arrivée de l’IA dans de plus en plus de domaines. Il faudra s’adapter, mais c’est effrayant de se dire que ce qu’on pensait être le propre de l’homme, à savoir la création artistique va être supplantée par l’IA et devenir un simple produit de consommation.
Mais on ne pourra jamais reproduire l’émotion !
Valentin : On espère bien !
Un de mes morceaux préféré est « The Equation or Abundance », cette belle balade lumineuse au milieu de l’album, posée comme une respiration.
Vince : Effectivement, il arrive à un moment de respiration comme tu le dis et coupe l’album en deux. Il parle d’un monde un peu dystopique où l’humain a choisi de vivre entièrement dans une réalité virtuelle d’où ce côté lumineux. On est dans un monde où tout va bien parce qu’on a décidé d’avoir le contrôle absolu sur notre manière de mener notre vie. Mais au prix de faire une croix sur la réalité. Musicalement, on a dans ce morceaux des touches d’obscurité dans quelque chose de globalement plus lumineux.
Vince, comment tu es venu à jouer du saxo ?
Vince : En tant que fan de fusion et de jazz, c’est un instrument qui m’a toujours attiré. L’achat de ma maison, a été une opportunité parce que je pouvais en jouer et faire plus de bruit qu’en appartement ! On s’est dit que ce serait cool d’en mettre dans nos morceaux, ça fonctionne bien et les gens ont l’air d’apprécier !
Je trouve que ces passages sont très apaisants. Est-ce que c’était votre intention ?
Vince : Le saxo a une palette sonore assez large. Il a cet aspect vraiment reposant et assez intuitif, mais j’ai finalement retenu l’aspect « qui envoie » !
Qui joue du piano sur le magnifique final de Specific Obsolescence ?
Vince : Il s’agit de l’un de mes amis Mathis Klein avec lequel j’ai un projet de jazz fusion qui s’appelle Odyssée. C’est un des musiciens les plus talentueux avec lequel j’ai pu jouer et il a fait un travail incroyable. On lui a donné l’idée harmonique et on l’a laissé faire. On a eu vraiment du mal à choisir entre la dizaine d’outro qu’il nous a envoyé parce qu’elles étaient toutes excellentes.

L’artwork a été créé par Shade Painting qui travaille avec vous depuis vos débuts. Quel a été le cahier des charges ? Comment vous avez travaillé ?
Vince : On fonctionne toujours de la même manière. On lui a envoyé les paroles et la musique et on lui a laissé carte blanche. Auparavant, on lui donnait un ton de couleur, mais sur celui ci son idée a été d’illustrer le concept de la Forêt Sombre (Dark Forest) qui est une des explications du paradoxe de Fermi. C’est-à-dire qu’il est de l’intérêt de la plupart des civilisations de rester cachées pour ne pas risquer d’entrer en conflit. Le choix s’est fait naturellement sur cette couleur et ça fonctionne bien.
Vous êtes chez M-Théorie Audio. Pourquoi eux et qu’est-ce qu’ils vous ont apporté ?
Vince : c’est le premier album que l’on sort chez eux. Pour l’instant ça se passe bien et on verra sur le long terme. En tant que groupe nous avons besoin d’une distribution internationale. On espère ensuite que cela débouchera sur des opportunité de tournées et qu’on sera mis en relation avec les bonnes personnes.
Je crois qu’il y a quelques dates qui se profilent. Est-ce que vous pouvez m’en dire quelques mots ?
Vince : nous serons aux Etats Unis et au Canada de mi-avril à mi-mai. Il y a également des festivals et des dates françaises en juin. Et on essaye de programmer une tournée en tête d’affiche majoritairement pour la fin de l’année.
Que voulez vous rajouter que j’aurais dû vous demander?
Vince : j’encourage les gens à écouter notre album et la musique en général vraiment dans son entièreté. Je pense que c’est la meilleure façon d’écouter une musique comme la nôtre.
Il faut aussi venir et soutenir les groupes en concert pour que ça perdure. Découvrir la musique, la vivre en vrai, rencontrer les gens qui la font est très important aussi bien pour les artistes que pour le public.
Retrouvez notre article à propos du dernier clip du groupe : https://loudtv.net/fractal-universe-un-album-et-un-clip-a-new-cycle/
POUR SUIVRE FRACTAL UNIVERSE
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Pour aller plus loin :
Fractale : Une figure fractale est un objet mathématique qui présente une structure similaire à toutes les échelles. (ex : les poupées russes) https://fr.wikipedia.org/wiki/Fractale
Paradoxe de Fermi : Le paradoxe de Fermi est le nom donné à une série de questions que s’est posées le physicien italien Enrico Fermi en 1950, alors qu’il débattait avec des amis de la possibilité d’une vie extraterrestre et d’une visite d’extraterrestres. https://fr.wikipedia.org/wiki/Paradoxe_de_Fermi
La théorie de la forêt sombre est une conjecture tentant de répondre au paradoxe de Fermi selon laquelle de nombreuses civilisations extraterrestres peuvent exister dans l’univers, mais que notre incapacité à les détecter tiendrait au fait que leur comportement est à la fois silencieux et paranoïaque.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_de_la_for%C3%AAt_sombre
Tigran Amasyan : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tigran_Hamasyan
Les frères Becker : https://fr.wikipedia.org/wiki/The_Brecker_Brothers
Allan Holdsworth : https://en.wikipedia.org/wiki/Allan_Holdsworth
Avishail Cohen : https://fr.wikipedia.org/wiki/Avishai_Cohen_(contrebassiste)





