Chronique de Dream Theater – Parasomnia (2025) : un rêve éveillé aux zones d’ombre

Derrière ce titre évocateur (et franchement beaucoup trop cool), Parasomnia, Dream Theater nous propose une plongée fascinante dans les tréfonds du rêve et des troubles qui l’accompagnent. Fidèles à leur réputation de titans du prog’, les Américains livrent ici une œuvre d’une cohérence et d’une densité rares (en tous cas, que je n’avais pas retrouvé chez eux depuis un petit moment), portée par une qualité de production irréprochable mais somme toute habituelle.
On vous en a parlé chez Loud TV : https://loudtv.net/dream-theater-les-details-du-nouvel-album-parasomnia/ car on l’attendait avec impatience… Voici donc notre avis sur Parasomnia (et son incroyable artwork).

Une alchimie sonore maîtrisée
Dès les premières notes, on ressent l’expérience et l’identité accumulée par le groupe au fil des décennies. La batterie de Mike Portnoy, de retour derrière les futs après l’ère Mangini (que j’ai adoré), marque le retour à des percussions peut être plus variées et une batterie plus « fleurie » voire plus exotique parfois (ou comme dirait mon ami Anthony : à une batterie plus « sable chaud » do Brazil). On sait aussi que Portnoy a eu un grand rôle dans les compositions de Dream Theater dans le passé. Du coup, pas de grande surprise : Parasomnia met clairement en valeur la batterie ainsi que la guitare de John Petrucci, avec des solos toujours plus intenses.
Les claviers de Jordan Rudess, bien que moins omniprésents que sur des albums comme Metropolis Pt. 2, ont leurs moments de gloire lors de passages mémorables. En revanche, la mise en retrait de la basse de John Myung (que j’adore pourtant pour sa pudeur et son humilité) se fait parfois sentir, privant certaines compositions d’une assise plus marquée, me semble t-il. Alors certes, on ne lui demande pas de nous faire un Solar Groove en plein album mais on sent tout de même une mise en retrait de la 6 cordes que je trouve dommage.
Autre choix audacieux (si on puit dire) : le chant de Kévin James LaBrie davantage en retrait (on se demande pas pourquoi), qui laisse la musique respirer et accentue l’immersion. Là où certains regrettent des performances vocales moins marquantes en live (pour ne pas écrire autre chose), ce choix studio semble ici pleinement justifié.
Une ambiance singulière
L’atmosphère de Parasomnia se détache quelque peu des envolées mélodiques classiques de Metropolis pour se concentrer sur des textures plus sombres et intrigantes. Pourtant, on est loin de mes premières amours prog’ pour Dream Theater, Peruvian Skies. Ici, le mystère règne en maître, soutenu par des compositions souvent labyrinthiques et des thématiques teintées de « sci-fi ».
- In the Arms of Morpheus ouvre l’album sur une note mystérieuse, à l’instar de Heaven’s Cove ouvrant The Astonishing. Le choix des accords dans la première minute évoque les OST de jeux cultes comme Final Fantasy VII et le thème de Vincent Valentine (arrêtez de me dire que je vois du FFVII de partout : je vous assure que quelques accords sont les mêmes). Ici, Jordan Rudess excelle : ses synthés tourmentés installent une tension avant de céder la place à une explosion instrumentale magistrale. Quelques touches mielleuses se glissent çà et là, mais sans jamais dénaturer l’ensemble.
- Avec Night Terror, on plonge dans le prog’ pur et dur : un solo de batterie impressionnant, des mélodies incisives, et une voix claire qui, même si elle fonctionne en studio, pourrait perdre de sa magie sur scène. Le solo de fin de Petrucci vient parfaire l’ensemble.
- A Broken Man s’aventure dans des rythmes presque excessifs, flattant les amateurs d’OST rétrogaming (Megaman et Command & Conquer, pour les connaisseurs). Sci-fi à souhait, cette piste ne laisse pas indifférent et le solo à la Steeve Morse apporte une touche des plus exaltantes.
Dream Theater n’a jamais aussi bien porté son nom
En plein rêve, certaines compositions marquent (plus ou moins positivement) de leur empreinte cette œuvre :
- Dead Asleep, véritable bijou de 11 minutes, est une démonstration de la capacité de Dream Theater à alterner lourdeur oppressante et rythmes effrénés. L’intro, évoquant une lointaine période artistique de Septicflesh, plante un décor sinistre avant une montée en puissance captivante.
- Midnight Messiah brille par une ambiance incroyable, plongeant l’auditeur dans une transe hypnotique. Si vous aimez les variations de 4/4 à 3/4, vous allez être servis !
- À l’inverse, Bend the Clock révèle une balade un peu trop sirupeuse. Evidemment, tout ceci est subjectif. Le titre reflète le côté parfois trop « culcul » de Dream Theater auquel j’adhère le moins. S’il casse un peu l’ambiance de Parasomnia, il n’en reste cependant pas déroutant dans la mesure où chaque album de Dream Theater a sa balade. Sans dire que Bend The Clock est insipide (pas autant que Wither tout du moins), elle ne deviendra pas non plus (a priori) une des balades phares du groupe, à la The Spirit Carries On.
- Enfin, The Shadow Man Incident, véritable mastodonte de près de 20 minutes, synthétise tout ce qui fait la singularité du groupe : des envolées pianistiques aux changements de rythme soudains, cette piste cristallise les qualités (et défauts) de Dream Theater dans une fresque exhaustive. Sans aller jusqu’à dire que The Shadow Man Incident est un fourre-tout musical, j’avoue que les morceaux de ce type, à l’exception de l’incroyable The Dance of Eternity, sont parfois un peu dans la sur-démonstration et apportent trop d’informations à l’auditeur, qui peut perdre le fil.
Verdict
Avec Parasomnia, Dream Theater signe, comme à son habitude, un album ambitieux, à la fois immersif et exigeant. A la différence des derniers albums qui, aussi sympa soient-ils, ne m’avaient pas plus emballée que ça à l’exception de quelques morceaux, l’ambiance de Parasomnia correspond terriblement à ce que j’aime ! Si certaines maladresses subsistent, notamment dans la gestion des voix (qui sont parfois incohérentes avec le mood des titres) ou des passages plus convenus, Dream Theater prouve une fois encore qu’il reste un maître incontesté du metal. S’il me semble que l’album s’adresse surtout aux fans de la première heure, il se prêtera bien volontiers aux auditeurs prêts à se perdre dans les méandres d’un univers sonore captivant et d’une ambiance des plus hypnotiques.
Pour voir Dream Theater en France en 2025 :
Samedi 07 juin – Nancy / Heavy Week-end
Samedi 21 juin – Clisson / Hellfest
Vendredi 18 juillet – Saint-Julien-en-Genevois / Guitare en Scène
Mardi 29 juillet – Orange / Théatre Antique





